Le titre de la Coupe du monde de cross-country se joue ce week-end, sur l'un des plus beaux circuits de VTT de la saison. À l'orée de la très excitante et ultime manche, qui débute ce vendredi à Mont-Sainte-Anne (Canada), le Français Jordan Sarrou (BMC) ne compte que 89 petits points de retard (pas grand-chose à l'échelle d'une saison) sur le Suisse Nino Schurter (Scott). Depuis 2016, et la dernière des sept Coupes du monde remportées par Julien Absalon, aucun Français n'a été en position de remporter le général de la Coupe du monde lors de l'ultime manche.
Nicolas Siegenthaler est l'entraîneur des deux pilotes en course pour le titre. L'instituteur suisse à la retraite a façonné - et accompagne toujours - le décuple champion du monde de VTT, et s'occupe également du Français, champion du monde 2020, depuis la saison dernière. Il nous détaille les différents aspects du duel auxquels être attentifs.
Le classement avant la manche canadienne
1. Nino Schurter, 1 433 points
2. Jordan Sarrou, à 89 points
3. Mathias Flückiger, à 167 points
La forme du moment
Avantage Sarrou
Dimanche dernier à Snowshoe (États-Unis), Jordan Sarrou a non seulement gagné la première manche de Coupe du monde de sa carrière, mais il s'est également replacé au 2e rang du général de la Coupe du monde. « En ce moment, Jordan a le vent dans le dos parce qu'il gagne. Nino lui, est malade depuis les Gets (début septembre). Il a eu le Covid et a eu vraiment de la peine à s'en remettre, dévoile Nicolas Siegenthaler. On n'arrive pas à faire les intensités qui étaient planifiées. C'est un peu plus dur. »
La deuxième place du Suisse lors de la course dimanche - après une 8e place à la short race deux jours auparavant - était presque inespérée, selon son entraîneur. « Je dirais que Nino a eu beaucoup de chance à Snowshoe, sur le cross-country, parce que sans la crevaison des deux gars (Pidcock puis Schwartzbauer, qui s'envolaient en tête à mi-course avec Sarrou), je pense qu'il aurait fait sept ou huit. J'ai vu d'entrée qu'il allait souffrir le martyre pendant toute la course. Ça se voyait. Il a pris des risques à gauche, à droite, dans la descente, dans les cailloux, j'avais peur qu'il perce. "Parce que c'était le seul moyen de me replacer", m'a-t-il dit. »
L'expérience
Avantage Schurter
« Nino a l'avantage des points et Jordan a l'avantage du succès. Nino doit défendre, tandis que Jordan doit attaquer, pose Siegenthaler. Sur l'expérience de ce genre de finale, c'est un peu neuf pour Jordan. » Avec ses huit Coupes du monde remportées depuis 2010 (et 35 manches, un record), le Suisse est assez madré pour aborder cette ultime confrontation. « Nino, jusqu'à maintenant, n'a jamais perdu quand il y avait un duel comme cela pour la gagne. Il l'a eu avec Burry Stander, (Jaroslav) Kulhavy, Julien (Absalon). Jamais il ne s'est fait avoir. Il ne va prendre aucun risque et rouler défensif. »
Le circuit
Égalité
La Coupe du monde se joue sur le circuit sans doute le plus technique des huit manches de la saison. Les racines, descentes et pierriers de Mont-Sainte-Anne semblent un peu plus taillés pour le Suisse, mais Nicolas Siegenthaler nous reprend : « J'ai roulé avec Jordan à Tignes cet été, il est très très fort techniquement. » Lui place le Français au même niveau que Schurter et Victor Koretzky comme les meilleurs pilotes techniques du plateau à l'heure actuelle.
Sur ce parcours, « la crevaison, c'est une faute » et non une fatalité, rappelle l'entraîneur suisse : à trop vouloir en faire, et à rouler plus durement, on prend des risques. « Nino va mettre des pneus renforcés, croit savoir Siegenthaler. Certainement qu'il va mettre une saucisse (une mousse) dedans avec un peu de "lait" (liquide préventif de crevaison) dans la roue arrière, etc. Ils ne vont prendre aucun risque. »
« Le premier à faire une faute pénalisante, mécanique, ou je ne sais quoi, celui-là sera éliminé », professe l'entraîneur en conclusion. La short race de ce vendredi soir permettra de dissiper un peu le brouillard entourant le lauréat de la Coupe du monde 2023.